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A la recherche de la réutilisation des eaux urbaines en agriculture : rationalité technicienne et impensés institutionnels dans le projet d’irrigation de Settat-Sidi El Aidi
Abstract
Dans un contexte de tension croissante sur les ressources en eau, la réutilisation des eaux urbaines en agriculture se trouve plus que jamais inscrite à l’ordre du jour au Maroc. Cet article retrace la construction et l’organisation d’un des périmètres pilotes recourant à ces eaux « non conventionnelles » à Settat, sur la commune voisine de Sidi El Aidi. Il s’appuie sur l’analyse des principaux documents du projet, sur une vingtaine d’entretiens semi-directifs, sur des mémoires d’étudiants et sur une longue immersion dans le cadre d’un appui à la concertation locale. Nous analysons les nombreuses incertitudes qui entourent encore la future gestion du périmètre, et expliquons pourquoi ces incertitudes perdurent en dépit du désir manifeste de nombreux acteurs d’afficher rapidement la réussite d’un projet pionnier. Nous montrons ainsi l’ampleur du décalage, dès l’origine, entre la grande attention accordée à la construction technique du périmètre (son dimensionnement, son équipement, son aménagement) et le relatif désintérêt pour les enjeux sociaux du territoire comme pour le cadre de gouvernance. Ce désintérêt a laissé se développer de multiples tensions entre agriculteurs, de même qu’entre ces derniers et l’administration. Ces tensions ne sont actuellement canalisées par aucune procédure légitime de choix collectif. Nous montrons qu’une manière de lever ces blocages serait de privilégier le caractère révisable et applicable des règles à adopter : c’est-à-dire d’entretenir un rapport moins dogmatique et plus pragmatique aux règles de droit.